Vers la fin d'un cycle ?

Canine ou rurale, quel avenir pour les vétérinaires ? février 2021

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Le contexte anxiogène lié à la crise sanitaire est propice aux prises de décision tranchées, radicales, fondées sur la raison et non sur l'affect. In fine, une invitation à se recentrer sur l'essentiel, sur ce qui est indispensable au sens que nous souhaitons donner à nos vies, tant sur un plan personnel que professionnel.

La profession de vétérinaire s'exerce désormais très majoritairement au bénéfice des animaux de compagnie, de sport et de loisir. Les éléments prospectifs conduisent à prévoir à l'horizon de 2030 un besoin en diplômés vétérinaires primo-inscrits au tableau de l'Ordre, supérieur au millier de vétérinaires pour les soins aux animaux de compagnie alors que cent cinquante suffiraient à couvrir la demande de la ferme France, dont une grosse dizaine pour la demande exprimée par les filières porcine et avicoles.

Sans prétendre détenir la vérité, admettons tout de même que les tendances majeures laissent peu de place au doute. L'espace économique créé autour des animaux de compagnie, élevés au rang de membres de la famille, est en croissance constante et soutenue. Les investisseurs extérieurs à la profession vétérinaire ne s'y trompent pas. Le signal donné est fort ! Le secteur du recrutement vétérinaire est en très forte et constante tension. Les compétences vétérinaires sont recherchées et fortement mobilisées par la demande en soins, en prévention, en bien-être et en accompagnement des détenteurs de ces animaux. Les praticiens trouvent plus sûrement dans cet exercice centré sur l'animal, en particulier sur l'animal malade, un écho à leur technicité, à l'organisation de plateaux techniques de haut niveau, à leurs aspirations à être reconnus comme une profession de santé à part entière et non comme l'arrière-boutique de la santé humaine dans laquelle les décideurs politiques s'évertuent à les cloisonner.

Dès lors, et devant ce constat finalement encourageant et valorisant pour les vétérinaires, est-il bien raisonnable de dépenser autant d'énergie, d'investir autant de moyens sur les dossiers liés aux animaux de production pour lever les multiples blocages, l'inertie permanente qui fait que rien ne semble jamais possible et tout remis à plus tard ? La course à obstacles est épuisante et semble sans fin. Le maillage vétérinaire dans les zones rurales s'effondre tous les jours un peu plus. Chacun constate, chacun déplore, mais pour autant rien de concret n'est encore abouti et le temps passe. Le service à la clientèle pour les animaux de la ferme, la prise en charge de ces animaux en situation d'urgence ne seront bientôt plus qu'un vague souvenir. Faut-il en blâmer les vétérinaires alors que tout est difficile d'un côté et que de l'autre toutes les audaces semblent possibles ?

Les ingrédients d'une rupture de cycle pour la profession vétérinaire sont désormais sur la table. La flamme chevillée au corps des vétérinaires depuis le XVIIIème siècle pour les soins animaux de la ferme vacille et ne tient qu'à un fil. Sans sursaut des parties prenantes, sans un consensus politique solide, urgent, entre les éleveurs, l'Etat, les Collectivités territoriales et les vétérinaires pour retrouver la confiance et réunir les moyens d'une inversion de tendance, les vétérinaires se consacreront à la médecine et à la chirurgie des animaux de compagnie pour lesquelles ils sont plébiscités et reconnues au titre d'une des professions préférées des Français.

Je vous souhaite une excellente année 2021 dans le respect des consignes sanitaires. Sortons ensemble et collectivement du Covid-19 !